Initiative

« Nous avons diminué notre marge pour préserver le pouvoir d'achat de nos clients »

Le 24/05/2022
par CMA 52
Noël Lepoix est gérant de la brasserie artisanale du Der, créée en 2006. Il évoque les conséquences de la hausse des prix de l’énergie sur la fabrication des bières.
Partager :

Avant la guerre en Ukraine, quelle était la situation de votre entreprise ?

L’activité de notre brasserie est saisonnière : peu d’activité le premier trimestre, une augmentation progressive jusqu’aux pics de juillet et août, pour redescendre progressivement jusqu’à la fin de l’année.

Avant le début du conflit, l’activité reprenait tout juste. Nous entamions la sortie de notre basse saison et sortions de deux années d’activité modérée en raison du contexte sanitaire.

Quelles sont les répercussions de la hausse du coût des énergies sur votre activité ?

Un certain nombre d’évènements annulés ou reportés ces deux dernières années ont été reprogrammés, si bien que la reprise d’avril s’est traduite par une augmentation de la demande, plus forte que d’habitude.

Toutefois, nos conditions d’activité ne sont plus celles des années précédentes, notamment en ce qui concerne l’achat des matières premières. Côté fournisseurs, pour le moment, nous ne rencontrons pas de difficultés d’approvisionnement.

Mais, cette année, en plus de l’augmentation annuelle des prix en janvier, nous avons déjà dû faire face à deux augmentations successives début mars et avril.

Celle du coût des énergies a un impact direct sur celui des bouteilles en verre, leur production nécessitant beaucoup d’énergie.

En l’espace de quatre mois, leur prix a bondi de 14 %. Même chose avec les cartons d’emballage qui ont augmenté de 20 %, touchés par la hausse du prix du bois. Notre propre facture d’énergie (gaz et électricité) a fortement augmenté. Ce poste de dépense représentait déjà, avant la hausse, plus de 8 % du chiffre d’affaires.

Quelles actions avez-vous mises en place pour réduire l’impact de l’augmentation du coût des énergies ?

Nos tarifs étant restés fixes depuis près de trois ans, nous avions décidé, en janvier 2022, de procéder à une augmentation de nos prix de vente. Nous ne pouvons décemment pas et ne souhaitons pas procéder à une nouvelle hausse des prix.

Pour le moment, nous avons fait le choix de diminuer notre marge afin de préserver le pouvoir d’achat de nos clients, dans l’espoir d’une amélioration de la situation. Afin de continuer à offrir la livraison à nos clients, nous avons travaillé sur l’optimisation de nos déplacements.

Nous regroupons nos commandes et nous étudions les circuits de livraison les plus courts. Nous avons différé nos projets d’investissement tels que l’achat de cuves en inox, dont le prix est passé de 800 € à 1.200 €. Enfin, notre temps de travail est annualisé, de façon à l’ajuster à la saisonnalité de l’activité.

Comment appréhendez-vous l’avenir ?

Nous espérons bien évidemment que le contexte politique s’améliore et que les prix de l’énergie reviennent à la normale. L’idéal, d’un point de vue financier mais également écologique, serait de proposer des bières en bouteilles consignées.

Malheureusement, pour laver les bouteilles et ôter les étiquettes cela nécessite d’investir dans des machines coûteuses et inaccessibles pour un grand nombre de brasseries artisanales. Une solution serait de sous-traiter la gestion des bouteilles consignées à une entreprise spécialisée dans ce domaine.

Elles sont rares et, à cause d’une trop forte demande, ne prennent plus de nouveaux clients. Cela nécessite également qu’aboutisse le projet d’uniformisation des modèles de bouteilles et de création de lieux de gestion des bouteilles consignées.

Il est mené actuellement par le syndicat des brasseurs indépendants dans la Marne ainsi qu’à Strasbourg. Nous pourrons alors réduire très fortement nos commandes de bouteilles et donc réduire nos dépenses ainsi que l’impact de notre activité sur l’environnement. À court terme, nous attendons des précisions sur certains dispositifs d’aide aux dépenses énergétiques annoncés par l’État.

>> En savoir plus sur les mesures d'aides pour faire face aux crises auprès de votre CMA 52

Partager :