Il va y avoir du sport...
Gilles Bourguignon - chef d'entreprise et ex-rugbyman professionnel
Hymne aux valeurs
Son nom dira forcément quelque chose aux amateurs de rugby : de 1988 à 1990, Gilles Bourguignon a porté à six reprises le maillot du XV de France, à un poste de deuxième ligne occupé avec l’autorité de son double mètre pour cent bons kilos durant une carrière exemplaire au sein du RC Narbonne. À aujourd’hui 55 ans, l’Audois se trouve à la tête d’une véritable PME de sept boulangeries plus trois points de vente saisonniers, sous différentes enseignes : Le Fournil de Gilles et L’Épi d’ovalie notamment. C’est dire s’il a su, cinq ans avant la fin de sa carrière sportive, travailler à la réussite de sa reconversion, et prouver que l’apprentissage d’un métier n’était pas incompatible avec la pratique d’un sport de haut niveau. Au sein de ses boulangeries, Gilles Bourguignon emploie cent salariés, dont une vingtaine d’apprentis, pour la plupart issus des CFA de Lézignan et de Rivesaltes.
Dans ses effectifs, il compte un ancien gymnaste chez qui il dit aujourd’hui retrouver « rigueur, équilibre, force mentale », et parmi ses apprentis « un boxeur et un rugbyman », « dont les clubs doivent parfois admettre qu’ils manquent un entraînement. Notre activité, c’est du sept jours sur sept par roulement, donc des week-ends travaillés. Nous devons veiller à établir une planification équilibrée, notamment pour ne dissuader personne de pratiquer un sport. » Pourquoi cette prévention ? Tout simplement « pour les valeurs que le sport permet d’inculquer à un jeune », répond-il. « Chez nous, où l’on travaille en équipe, c’est particulièrement parlant. Tolérance, respect, honnêteté, courage : le sport en est imprégné et le travail le met en pratique. Le sport implique de l’exigence envers soi-même, le goût de l’effort, la volonté de dépassement. Et permet de se construire face au stress, à la peur de l’échec, au regard des autres. Il nous amène à trouver des solutions, en plus de s’épanouir. C’est primordial pour l’équilibre de l’individu. » Parole d’expert !
Laurent Fabre - Conseiller principal d’éducation
« Sport et métier » dans les starting-blocks
Le CFA de Rivesaltes, dans les Pyrénées-Orientales, compte 800 élèves et forme à 14 métiers (alimentaire, services, automobile…). Laurent Fabre, le conseiller principal d’éducation depuis 25 ans, y porte, en cette rentrée 2019, le programme « sport et métier », également lancé dans un secteur plus rural, à Mende (Lozère). « C’est une expérimentation, précise-t-il, mais nous sommes convaincus de pouvoir faire des émules, notamment dans des régions encore plus sportives que la nôtre. »
Le dispositif est parti d’un constat : l’abandon d’une pratique sportive en club par l’immense majorité des jeunes entrant en apprentissage. « Or, quand on connaît les vertus sociales et éducatives du sport, ce constat a de quoi perturber, explique Laurent Fabre, membre actif de l’Andsa. De plus, nos apprentis exercent souvent dans de petites entreprises, dans les villages : leur implication dans un club sportif est bonne pour le dynamisme et peut leur offrir de nouvelles opportunités dans les entreprises qui sponsorisent ces clubs. » Des partenariats entre l’établissement et les clubs ont donc été noués : lors de leur semaine au sein du CFA, les jeunes (une cinquantaine à Rivesaltes pour commencer) suivent, après les cours du lundi, du mardi et du jeudi, un programme de récupération, renforcement musculaire, préparation physique. Deux enseignants encadrent l’opération, qui a mobilisé un budget d’environ 3 000 € pour l’achat de matériel.
Romain Larrigole, professeur d'EPS
« Emmener un jeune à l’employabilité »
Romain Larrigole enseigne l’éducation physique et sportive (EPS) en CFA depuis maintenant dix ans. Il vient tout juste d’élargir son cursus en consacrant un master 2 à la question du lien entre apprentissage et éducation physique et sportive. « L’enseignement de l’EPS est structuré, à la base, pour le collège
et le lycée ; son rapport avec le monde de l’entreprise auquel prépare l’apprentissage n’est pas naturel. Au sein du CFA Henri-Martin de Lézignan-Corbières (Aude), nous proposons, deux heures par semaine,
un enseignement de l’EPS plus en lien avec le milieu professionnel. Nous travaillons sur une finalité partagée par tous – enseignants, familles, apprentis, direction de l’établissement, élus de la chambre de métiers et de l’artisanat – : l’employabilité. Car il en est de l’EPS comme des autres matières enseignées : elle doit contribuer à emmener un jeune à l’employabilité. » Un maître mot décliné en deux objectifs : d’abord, former un bon salarié ; ensuite, former un responsable. Dans le premier cas, trois notions sont à l’œuvre : l’engagement, l’adaptation, le relationnel. Dans le second cas, c’est l’autonomie, l’analyse et le management qui sont particulièrement travaillés. « Nous cherchons donc à trouver des activités sportives qui correspondent au mieux aux notions évoquées. Par exemple, en CAP coiffure, course en durée, tennis de table, sport collectif, relais 4 x 50 mètres… », conclut Romain Larrigole.
L’Association nationale pour le développement du sport dans l'apprentissage (Andsa) est un peu le comité olympique des chambres de métiers et de l’artisanat (CMA) ! Son credo : encourager les apprentis
à démarrer ou reprendre une activité sportive en club, via des partenariats, l’organisation d’événements et, bien entendu, en s’appuyant sur le réseau des CFA des CMA. Mais l’Andsa propose aussi des formations et s’apprête à en tester une nouvelle, en partenariat avec la Fédération française de judo : gérer la chute pour éviter les accidents du travail. Une démarche déjà suivie par des écoles de jockeys, notamment,
dont pourront profiter les entreprises artisanales. Tél. : 05 34 48 09 82 - andsa.org
>> Lire aussi l'interview de Joseph Calvi, président de la CMA de l'Ariège, à la tête de l'Andsa
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