Plan en faveur des indépendants : les propositions inspirantes de l’OTI
3,6 millions : c’est le nombre d'indépendants en France fin 2019, selon le dernier bilan de l’Acoss.
Autant d’artisans et de micro-entrepreneurs à protéger tant ils ont été durement frappés par la crise.
À la demande du président Emmanuel Macron, Alain Griset, ministre chargé des PME, travaille depuis fin janvier à l’élaboration d’un "plan spécial pour les indépendants, les commerçants, les très petites et moyennes entreprises".
Parmi les thèmes déjà sur la table : le statut des travailleurs indépendants et la protection sociale.
L’Observatoire du travail indépendant (OTI) a apporté sa pierre à l’édifice dans une note contenant 12 propositions pour améliorer les conditions d’exercice des travailleurs indépendants.
Entretien avec Guillaume Cairou, membre fondateur de l’OTI et président de Didaxis-Hiworkers.
Quelle est la vocation de l’OTI ?
Il est double. Il s’agit d’une part, d’analyser et mesurer les évolutions de cette forme particulière d’activité qu’est le travail indépendant, et d’autre part de faire des propositions aux pouvoirs publics pour l’améliorer.
La particularité de l’observatoire est d’être constitué d’experts politiques, comme Hervé Novelli, ancien secrétaire d’État au commerce, à l’artisanat et aux PME, et acteur de la mise en place du statut d'auto-entrepreneur (devenu micro-entrepreneur) en 2009, ou encore Alain Griset, l’actuel ministre des PME qui est membre depuis cinq ans ; d’avocats, à l’image d’Emmanuelle Barbara et de Jacques Barthélemy ; mais aussi de syndicalistes et d’économistes qui se positionnent, par-delà les clivages politiques, dans l’intérêt unique d’améliorer l’entreprenariat français.
Pourquoi valoriser les indépendants ? C’est la forme de travail de la relance selon vous ?
Les indépendants d’aujourd’hui sont comme les artistes de l’après-guerre : ce sont des défricheurs qui vont redynamiser les territoires.
Ils se révèlent les "artisans de la relance" car ils se montrent agiles, mobiles, engagés et résilients.
À l’heure de la Covid-19 et des bouleversements traversés, je vois en eux la solution de la lutte contre la désertification rurale, le chômage de longue durée et le made in France.
Que faut-il retenir des douze propositions que vous avez remises au ministre Alain Griset ?
La proposition centrale est la simplification des dispositifs existants afin d’avoir un statut unique du travail indépendant.
Aujourd’hui, aussitôt la volonté de se lancer est-elle concrétisée que les embûches se multiplient : manque d’accompagnement, complexité des statuts juridiques, problématiques de Sécurité sociale et de cotisations…
S’il n’y avait qu’un seul mot à retenir de ces propositions ce serait : "simplifier".
Pouvez-vous nous en dire plus sur ce statut unique d’entrepreneur indépendant ?
Hors de question de superposer un statut supplémentaire à ceux existants, ni de réformer le Code des sociétés.
Nous proposons de créer une plateforme, et de recourir au portage salarial, comme le recommande Jean-Yves Frouin, dans son rapport "Réguler les plateformes numériques de travail", remis récemment au Premier Ministre.
Objectif : sécuriser les relations de travail entre les plateformes et les indépendants, et les faire profiter du régime général de la Sécurité sociale.
Ce statut unique s’adapterait aux besoins de chacun, car il serait évolutif en fonction du "développement effectif" de l’activité.
Le statut juridique et le niveau de protection pourraient évoluer en fonction du développement de la structure, et grâce aux conseils dispensés par un guichet unique.
Vous proposez également d’étendre l'éligibilité de l’allocation des travailleurs indépendants (ATI)…
L’ATI doit indéniablement être réformée, notamment en abaissant le critère de revenu, de 10.000€ à 5.000€.
Ce montant trop élevé est responsable des trois-quarts des refus de demandes ! Dans la même optique, je propose d’étendre l’éligibilité à l’ATI aux entrepreneurs en liquidation amiable, ainsi qu’aux entrepreneurs ayant porté leur activité en continu pendant une année et non deux.
Au-delà de vos propositions, souhaitez-vous une allocation pour tous les indépendants ?
En effet, je suis un fervent défenseur d’un revenu universel pour les indépendants : un RUI. Rappelons que les indépendants en difficultés ne représentent que 10% de cette population de créateurs de richesses.
À travers le guichet unique que l’OTI appelle de ses vœux, les entrepreneurs cotiseraient pour avoir droit à une allocation en cas de perte d’activité. Ces nomades des compétences et des situations pourraient ainsi rebondir et recréer.
Le rapport appelle à un "renforcement" du rôle des chambres consulaires : qu’entendez-vous par là ?
Les chambres de métiers et de l’artisanat (CMA) et les chambres de commerce et d’industrie (CCI) doivent réaffirmer leur rôle, par le biais de l’organisation ou de la promotion de davantage de salons, colloques et journées portes ouvertes réunissant des professionnels.
Les CCI et CMA pourraient en parallèle contrôler l’accès des indépendants, TPE et PME à la commande publique, et veiller à leur réserver certains marchés publics, sous conditions d’expertise et de moyens techniques suffisants.
La principale cause de dysfonctionnement des micro-entreprises, est le manque d’accompagnement. Je propose d’utiliser l’écosystème existant, dont les CMA, pour simplifier la vie des créateurs.
"Lancez-vous ! Créons les conditions d’un mieux travailler et consommer ensemble. Nous sommes un pays d’indépendants, et nous avons la capacité de devenir la première Nation d’indépendants au monde !"
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