Travailler seul(e)

Isolement de l'entrepreneur : 3 questions à... Olivier Torres

Le 02/05/2018
par Propos recueillis par Sophie de Courtivron
Professeur à l’Université de Montpellier et Montpellier Business School, Olivier Torres est aussi le président d’Amarok, premier observatoire de la santé des dirigeants de PME. Pour nous, il décrypte les contours de l'isolement des artisans, et les solutions pour y remédier.
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Olivier Torres Amarok

Quelle est la situation des artisans par rapport à l’isolement ?

La surcharge de travail des artisans renforce leur sentiment d’isolement. Amarok a mis en évidence que les 3 millions d’artisans et d’indépendants travaillent 55 heures par semaine (avec des pics de 80 heures !), alors que les autres Français travaillent 38,4 heures. Nous avons montré que la solitude est directement reliée au burn-out. Or plus les artisans ont de difficultés et plus ils prennent sur eux-mêmes, travaillent plus pour compenser une baisse de chiffre d’affaires, etc. À long terme, cette surcharge de travail a deux conséquences : la réduction du temps de sommeil et la réduction du temps consacré à la famille ou à soi-même. Ce qui renforce le sentiment d’isolement et le risque d’épuisement professionnel…

Le risque est-il permanent ?

Les trois à cinq premières années sont toujours un moment d’euphorie. On est dans le projet, dans un champ des possibles élargi… L’être humain se construit par le projet, c’est un besoin existentiel. Nous avons mis en évidence que le projet augmente les facteurs « salutogènes » (bons pour la santé) que sont la capacité d’adaptation, le fait d’assumer et de maîtriser ses décisions (le grand principe 
de la détermination), l’endurance, qui est proche de la résilience (rebondir après un échec) et l’amour du travail bien fait. Le projet artisanal est très bon pour la santé. Cela s’émousse avec le temps.

Comment faire pour tenir le cap ?

L’artisan doit savoir s’entourer, l’entourage est tellement stratégique dans une petite structure ! C’est un antidote à la solitude. Si on y réfléchit, on peut trouver des tas de solutions. Comme se créer un « conseil stratégique » avec deux ou trois amis artisans ; vous vous réunissez une fois tous les six mois, autour d’un bon repas, et vous leur exposez votre stratégie pendant une heure (environnement, angoisses…). Ils vont vous dire ce qu’ils en pensent et servir de miroirs. Cette astreinte à rendre compte de ce que l’on fait à intervalle régulier est une force.

www.observatoire-amarok.net

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