Jean-Pierre Vexlard, MOF en fonderie
Le ruban bleu blanc rouge et la médaille autour du cou, Jean-Pierre Vexlard se sent particulièrement ému par cette reconnaissance de son travail par ses pairs. Ses clients, eux, savent depuis longtemps que la petite fonderie vosgienne cachée dans le bâtiment métallique le long du vieux chemin de Brû à Rambervillers, est une pépite.
L’entreprise n’a pas de site internet, pas d’enseigne, mais ils ont bien repéré qu’il y avait là des magiciens capables de donner corps à leur œuvre, ultime étape après sa conception dans leur esprit.
Pellini, Pierre Texier, Roger Patrick, Erwin Wurm… les artistes viennent de France et de Navarre rencontrer ces hommes de l’art qui mouleront la création confiée et en sortiront le bronze qu’ils sublimeront par le long et minutieux travail de polissage, de patine et autre technique de finition.
Déceler les pièges techniques
C’est pour se dépasser et apprendre encore que Jean-Pierre Vexlard a voulu se confronter au concours du Mof. Il ne le cache pas, le "discobole", sujet du concours 2018 en fonderie d’art, lui a donné du fil à retordre.
Quand il a reçu la statuette en plâtre de 30 centimètres de haut, Jean-Pierre Vexlard l’a d’abord laissée de côté quelque temps, pour l’observer. Déceler les pièges… Concours MOF oblige, la pièce cumulait nombre de difficultés techniques. Construire le moule en sable, réaliser le noyau, régler le tirage d’épaisseur, couler la pièce, tout cela n’était pas gagné, malgré l’expérience acquise en trente ans de métier. Le dossier à produire, retraçant les étapes de travail et justifiant les choix techniques et les partis-pris du fondeur, était aussi une épreuve !
Le sujet exigeait également un acte créatif de l’artisan, en lui laissant carte blanche pour créer le socle de la statuette coulée. Jean-Pierre a misé sur un empilement de disques réalisés conformément aux modèles homologués par la Fédération des lanceurs de disque. Il a joué sur les deux tailles, homme, femme, clin d’oeil à la "parité" dans le sport. Il a empilé 5 disques : les cinq anneaux olympiques. Il a choisi une progression de couleurs, du vert antique de la période du discobole, au brun de l’ère industrielle à laquelle a débuté le moulage au sable.
Du stress et des heures…
"Des heures de travail, des prises de tête… l’aventure tournait à l’obsession", confie Jean-Pierre qui a douté jusqu’à la fin. Quelques petites mésaventures techniques ont fait monter le stress jusqu’au bout. En octobre, le résultat final est venu le délivrer de ses angoisses. Le jury lui a décerné le titre. Ce jour-là, l’artisan a particulièrement pensé à Casimir Pawlak, son professeur de fonderie de Loritz, lui-même MOF.
La boucle était bouclée... Enfin pas tout à fait... "Le titre de Meilleur Ouvrier de France, ce n’est pas une fin en soi", relativise le fondeur. "Tous les jours, on est à l’épreuve pour toucher l’excellence. Ça ne s’arrêtera pas là, il faut continuer, ce métier est un défi quotidien…" Et puis l’artisan aimerait aussi voir ses propres salariés se laisser tenter par le concours… "Je suis sûr qu’ils en sont capables. Je les soutiendrai."
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