Défaillances d'entreprises : le calme avant la tempête ?
Les dernières semaines ont été éprouvantes pour les petites entreprises, et chaque annonce chiffrée laisse craindre le pire... Dévoilées le 29 avril par Altares, les données sur les défaillances d'entreprises ne dérogent pas à la règle.
Pas de tribunaux : pas de procédures...
Durant la première quinzaine du mois d'avril, "seules" 649 ouvertures de redressements et liquidations judiciaires et 30 procédures de sauvegarde ont été enregistrées en France, contre 2.733 sur la même période en 2019.
Mais si "la déferlante redoutée n’est donc pas encore là", il convient de pondérer ces chiffres... En effet, la fermeture des tribunaux en mars et les ordonnances relatives aux droits des entreprises en difficultés expliquent le nombre limité de procédures. "L’ordonnance 2020-306 du 25 mars, notamment, permet qu’une entreprise en difficulté puisse reporter sa demande d’ouverture de procédure collective après le 24 juin", détaille le directeur des études d’Altares, Thierry Millon.
Autre mise en perspective : depuis début janvier 2020, 11.500 défaillances d’entreprises ont été enregistrées en France, soit 6.000 de moins que sur la même période 2019. Le nombre d'ouvertures de procédures collectives était en recul de plus de 21% en janvier 2020 et de 14% en février...
Hausse de la sinistralité des PME
Malgré un léger "mieux" début 2020, la souffrance des petites entreprises est donc toujours présente. Fait nouveau, Altares note "un signal fort de la fragilisation inquiétante des PME", plus spécialement de celles qui étaient déjà en difficulté avant la crise. Ainsi, sur les 15 premiers jours d'avril, plus d’1 défaillance sur 10 concernait une PME (12%), contre 5% sur la même période en 2019. En outre, deux tiers de ces structures se trouvaient en cessation de paiement avant le 12 mars.
Du côté des TPE, le constat n'est pas plus brillant : elles sont, comme de coutume, les premières touchées par les défaillances : 88% des procédures les concernent (contre 90% en temps "normal").
Aucun secteur d’activité ne semble en outre se démarquer : la construction (22%) et le commerce (22%) se partagent près de la moitié des défaillances d’entreprises. Suivent les services aux entreprises et les cafés-hôtels-restaurants (à 14% chacun) et l’industrie (9%).
Deux échéances à surveiller !
Difficile de tirer des conclusions avec des chiffres biaisés par un contexte exceptionnel... Altares invite donc à la vigilance. Le cabinet cite notamment "deux échéances clés", qui "pourraient directement influer sur le rythme des défaillances".
Première date : le 24 juin, soit un mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire. "Jusqu’à cette date, la période dite 'suspecte' qui permet de remettre en cause tout acte effectué par une entreprise en cessation de paiement, est mise entre parenthèses". Or, après le 24 juin, les entreprises en cessation de paiement "seront tenues de demander l’ouverture d’une procédure collective"...
Seconde date : le 24 août. Passés trois mois après la fin de l'état d'urgence, l'état de cessation des paiements de l'entreprise "est apprécié au regard de sa situation financière constatée au 12 mars 2020" (début de l'état d'urgence sanitaire). Ainsi, jusqu’au 24 août, une entreprise pourrait ne pas être considérée en état de cessation de paiement si elle ne l’était pas au 12 mars.
Anticiper la casse
À court et moyen terme, il sera crucial de "mesurer les effets des plans d’aides et de relances que les pouvoirs publics mais aussi les acteurs du privé ont déjà initié ou pourraient encore dévoiler dans les prochaines semaines (régions, banques, assureurs…)", note Thierry Millon.
Ce dernier invite les acteurs économiques à s'interroger sur le "changement de paradigme" occasionné par le Covid-19 et à préparer dès aujourd'hui la "sortie de l’orage violent qui nous secoue". "Les règles ont provisoirement changé et la confusion règne, parfois entretenue à coup de slogans cataclysmiques nourris de projections chiffrées parfois discutables", avertit ainsi le directeur des études d'Altares. "
- Connectez-vous ou inscrivez-vous pour publier un commentaire