Apprentissage

Six mois après la rentrée : que faire des 30.000 apprentis sans employeur ?

Le 24/02/2021
par Julie Clessienne
L’apprentissage a le vent en poupe. Au point que la demande supplante l’offre ! Le Plan "1 Jeune, 1 Solution" instaurait une période de six mois (au lieu de trois) pour trouver une entreprise d’accueil, mais près de 30 000 jeunes se retrouvent dans l’impasse alors que le délai arrive à expiration. Par le biais d’une instruction interministérielle envoyée le 19 février, le Gouvernement incite les préfets de région à trouver des solutions.
Partager :

Si la 3e Semaine de l’apprentissage dans l’artisanat a permis, début février, de remettre en lumière le niveau record d’inscriptions en 2020 (100.000 jeunes accueillis dans les CFA du réseau des CMA à la rentrée 2020, soit 4% d’augmentation), une inquiétude se profile du côté des pouvoirs publics…

Sur les 500.000 contrats signés à la rentrée 2020 (tous secteurs confondus), près de 30.000 jeunes n’ont toujours pas réussi à trouver une entreprise pour effectuer leur formation en alternance. Le plan gouvernemental "1 Jeune, 1 Solution" avait pourtant prolongé à six mois le délai pour que les jeunes inscrits en CFA ou en écoles entre le 20 août et le 31 décembre 2020 puissent trouver une entreprise d'accueil.

Risque pour ces jeunes : la perte du statut d'apprenti, la poursuite de l’enseignement dans l’école ou le CFA comme étudiant "classique" (et donc l’obligation de payer des frais de scolarité), une expérience amoindrie, voire l’obligation d’abandonner son parcours ou de perdre une année.

Une mobilisation générale pour structurer un plan d’actions

Alors que l’échéance arrive à son terme (fin juin 2021 pour les apprentis inscrits en décembre 2020), les ministères du Travail, de l’Éducation nationale, de l’Agriculture et de la Fonction publique ont invité les préfets de région à mettre en place un plan d’actions pour éviter les ruptures de parcours ou orienter ces jeunes vers des solutions alternatives.

Par le biais d’une instruction interministérielle, en date du 12 février dernier, les services de l’État sont ainsi incités à travailler de concert avec les forces en présence au niveau local, comme les opérateurs de compétences, les réseaux des CMA et des CCI, les conseils régionaux ou encore les services publics de l’emploi.

"Ces jeunes qui ont choisi un projet professionnel et acquis des connaissances théoriques solides au cours de ces six premiers mois de formation, doivent pouvoir poursuivre leur parcours et obtenir une certification", souligne l’instruction interministérielle.

Les solutions alternatives à l'étude

Parmi les solutions à défricher :

  • la recherche de nouveaux employeurs,
  • le retour en voie scolaire,
  • la poursuite de la formation dans un autre établissement de l'académie ou les académies voisines,
  • l'orientation, via les plateformes de suivi et d'appui aux décrocheurs, vers les places de formation ouvertes dans le cadre de la "Promo 16-18", dispositif porté par l'Afpa,
  • le financement, par les Régions, de projets de formation individuels ouvrant accès au statut rémunéré de stagiaire de la formation professionnelle,
  • la prise en charge du jeune dans un parcours d'accompagnement ou de redéfinition de son parcours professionnel avec l'appui des acteurs régionaux du service public de l'emploi.

Des délais serrés pour s'organiser

Objectif : structurer ce plan d’action d’ici à la fin du mois de février en nommant des référents et en organisant un suivi régulier par le biais de réunions hebdomadaires avec tous les acteurs concernés.

Un délégué à l’apprentissage en lien avec les conseils régionaux pourrait également être nommé.

Les Carif-Oref, qui ont établi une cartographie des effectifs d’apprentis sans contrat, par domaine et niveau de formation, s’avéreront, dans ce contexte, être d'un appui bien utile.

L'exemplarité des CFA des chambres de métiers et de l'artisanat

La loi du 5 septembre 2018 "Pour la liberté de choisir son avenir professionnel" a facilité l’ouverture de centres de formation d’apprentis. Ce qui n'exempte pas ces nouveaux CFA d'une de leur vocation première : aider les jeunes à trouver des entreprises ! Dans une interview donnée à nos confrères de L'Etudiant EducPros, Elisabteh Borne a souligné l'exemplarité des CFA "historiques", comme ceux du réseau des CMA : "Je constate qu’ils passent toute l’année à être en contact avec des entreprises potentielles pour que leurs jeunes trouvent des contrats. Je connais dans les métiers de l'artisanat des directeurs de CFA qui auraient pu accueillir plus de jeunes mais s'y refusaient s'ils n'étaient pas assurés de leur trouver une entreprise. C’est cela qu’on attend d’un CFA". 

De son côté, CMA France confirme que, fin janvier 2021, moins de 1% des apprentis des CFA du réseau des CMA étaient concernés par cette problématique. Pour la tête de réseau des CMA, il y a une bonne raison à cela : "Nous accueillons des jeunes qui ont un projet et pour lesquels nous savons que nous allons pouvoir trouver une solution". Pour autant, pour ceux encore sans employeur, "des discussions sont en cours afin qu’ils puissent rester dans nos établissements au moins jusqu’à la fin de cette première année de formation". Un cas de figure qui pourrait être particulièrement adapté aux apprentis du secteur de la restauration, privés de temps en entreprise pour cause de fermeture administrative, "sous réserve, bien sûr, que leur situation juridique soit stabilisée via le statut de stagiaire de la formation professionnelle".

 

Partager :